Pourquoi je ne crois pas à l'islam modéré
par
Fjordman
Je ne crois pas qu’il existe un Islam modéré et j’ai été clair à ce sujet depuis que j’ai commencé à écrire. Je suis sur ce point particulier en désaccord avec des observateurs tels que le
Dr. Daniel Pipes. J’aimerais dire à Pipes que j’apprécie beaucoup son travail. Je mes suis maintes fois référé à lui et je compte bien continuer à le faire à l’avenir. Cependant je suis de plus en plus consterné par le nombre de personnes rabachant l’incantation appelant à un " Islam modéré " alors que j’attends toujours de voir le début d’une preuve de la réalité de l’existence d’un Islam modéré.
Quand on lui demande où l’on peut trouver un Islam modéré, Daniel Pipes s’est fréquemment référé à feu l’ouléma soudanais Mahmoud Muhammud Taha, dont les idées sont disponibles en Anglais dans le livre
The Second Message of Islam. Un disciple et traducteur de Taha Abdullahi Ahmed An-Na'Im, auteur du livre
Toward an Islamic Reformation, dit
ceci des idées de son maître :
"
[Le] message de Médine n’est pas le message fondamental, universel, éternel de l’Islam. Ce message fondateur est celui de La Mecque. C’est pourquoi la réforme de l’Islam doit être basée sur un retour au message de La Mecque. Afin de réconcilier les messages de La Mecque et de Médine dans un seul système, les juristes musulmans ont affirmé que certains des versets de Médine ont abrogé les versets antérieurs de La Mecque qui y correspondent. Quoique l’abrogation ait effectivement eut lieu, et c’était une jurisprudence logique et valide pour une époque, ce n’était qu’un ajournement, et non une abrogation définitive."
C’est pourquoi An-Na'Im considère que "
Les versets de La Mecque devraient maintenant devenir la base de la loi et les versets de Médine devraient être abrogés. Cette contre abrogation se traduira par une complète réconciliation entre la loi islamique et les développements modernes des droits de l’homme et des droits civiques. En ce sens, nous autres les réformateurs nous sommes des superfondamentalistes."
J’ai lu attentivement les livres de Taha et de An-Na'Im. Je trouve que leurs écrits semblent meilleurs quand vous les lisez pour la première fois que quand vous les relisez. Par exemple, Taha suggère que la raison pour laquelle Mahomet et les premiers Musulmans ont été "obligés" d’assassiner tant de gens était que ces individus n’avaient pas accepté l’Islam pacifiquement. Non seulement Taha ne semble pas estimer que c’était mal mais il décrit le Djihad armé comme un "instrument chirurgical" qui peut être employé pour installer le vrai Islam. Il indique que cela ne sera heureusement pas nécessaire parce que les hommes sont maintenant suffisamment "mûrs" pour comprendre que l’Islam est bon pour eux et se soumettront sans qu’il soit nécessaire d’avoir recours à la coercition.
Qu’adviendra-t-il de ceux qui n’aiment pas l’Islam et ne comptent pas se soumettre ? Taha ne le dit pas, mais à en juger par ses écrits il semble considérer que contre ce type de personnes la violence se justifie. Il est difficile de déterminer en quoi cela est censé représenter un mode de pensée "réformiste". Selon la théologie islamique orthodoxe, les musulmans n’ont pas le droit d’attaquer physiquement les non musulmans tant qu’ils n’ont pas d’abord été invités à embrasser l’Islam et qu’ils ne l’ont pas rejeté, dans ce cas cela devient légitime. En d’autres termes, les Musulmans sont censés essayer de commencer à convertir les gens pacifiquement et ne se mettre à les tuer que s’ils refusent. Taha défend donc une conception traditionnelle du Djihad pas très différente de celle qu’épousent des terroristes djihadistes tels que Osama ben Laden.
Bien que Taha ressemble à un apologiste de la violence djihadiste, il fut néanmoins considéré comme si hérétique par les musulmans traditionnels qu’il fut exécuté pour apostasie. En outre ses conceptions reposent sur des "vérités" coraniques douteuses. Considérez ce que le professeur allemand
Christoph Luxenberg affirme dans son œuvre de référence :
"
Au départ, le Coran est un livre liturgique Syro-Aramaïque, avec des hymnes et des extraits des Ecritures qui ont pu être employés dans les offices sacrés chrétiens. En second lieu, on peut voir dans le Coran le commencement d’une prédication visant à propager, en langue arabe, la foi en les Saintes Ecritures aux païens de La Mecque. Ses sections sociopolitiques, qui ne sont pas particulièrement liées au Coran originel, furent ajoutées par la suite à Médine. A son commencement, le Coran n’avait pas été pensé comme le fondement d’une nouvelle religion. Il présupposait la foi en les Ecritures et était destiné à évangéliser la société arabe."
En d’autres termes, si M. Luxenberg voit juste, ce que nous appelons maintenant les chapitres mecquois du Coran sont pacifiques précisément parce qu’ils ne sont pas "islamiques" du tout mais sont au départ des textes chrétiens. Les textes "authentiques" directement liés à Mahomet et à ses compagnons, qui que le Mahomet historique ait vraiment pu être, sont les chapitres bien plus violents et agressifs que nous classons dans les Médinois. C’est donc exactement le contraire de ce que Taha et An-Na'Im suggèrent. D’un point de vue laïc, leurs idées sont particulièrement vulnérables à la critique historique, et d’un point de vue islamique il est difficile de concevoir comment elles pourraient être mises en oeuvre.
Après avoir parcouru la littérature sur le sujet, je diviserais les " réformateurs musulmans " en trois catégories. La première, et de loin la plus importante, consiste en tous les menteurs, opportunistes et autres artistes de la taqiyya ; ceux qui veulent plutôt infiltrer nos sociétés que réformer l’Islam. La seconde catégorie consiste en des gens qui peuvent être bien intentionnés mais ne savent tout simplement pas de quoi ils parlent. Irshad Manji, par exemple, n’est pas une mauvaise personne mais elle ne connaît pas grand-chose de l’histoire de l’Islam. La troisième et la plus petite de ces catégorie consiste en ceux qui s’y connaissent et désirent sincèrement des réformes. L’érudit germano-syrien Bassam Tibi peut y être rangé. Je trouve intéressants certains de ses travaux mais il est quand même incohérent et peu convaincant quand il expose à quoi un Islam modéré devrait ressembler.
Où Taha se range-t-il dans ce tableau ? Franchement, je le suspecte d’appartenir à la première catégorie. Il n’est pas convaincant sur le plan théologique et certains des passages qu’il a rédigés sont particulièrement choquants si vous les lisez attentivement et analysez froidement ce qu’il affirme vraiment. Les citations qui suivent, avec référence des pages, sont tirées du livre
The Second Message of Islam par Mahmud Muhammud Taha.
Page 74:
"La réciprocité (al-mu'awadah) dans le cas de la fornication est une peine (hadd) de mise à mort par lapidation ou de fouet. Puisque le fornicateur a recherché un plaisir facile sans considération pour la Shari'a, on lui fait subir la souffrance pour qu’il recouvre ses esprits. L’individu a d’avantage tendance à incliner vers le plaisir que vers la douleur. En infligeant la douleur à l’individu, quand il succombe au plaisir interdit, on rétablit a certain équilibre et on lui évite de sombrer dans l’imprudence et la folie. La punition fixée pour la consommation d’alcool est basée sur le même principe. Une personne qui boit de l’alcool souhaite s’abrutir pour essayer de fuir la réalité. La souffrance de la flagellation a pour but de le ramener au sens des amères réalités, de sorte qu’il ait un esprit clair pour tenter d’améliorer cette même réalité."'
Page 75:
"L’Islam, dans son essence, n’est pas une religion au sens commun du terme, mais plutôt une science, son dogme n’étant qu’une simple transition vers son stade scientifique."
Page 130:
"Nous avons dit que le Coran fut divisé entre le al-iman et le al-islam, comme il fut révélé en deux parties : la Mecquoise et la Médinoise. Le Coran de La Mecque fut révélé en premier. En d’autres mots, les hommes furent d’abord invités à adopter l’Islam [dans son sens premier], quand ils y faillirent et qu’il fut ainsi démontré qu’ils étaient inférieurs à sa norme, ils furent traités en tenant comptes de leurs limites."
Mon commentaire : Ce que Taha veut ici dire, et qu’il précise dans d’autres passages, est que pendant le début de la phase mecquoise les Musulmans invitèrent les gens à adopter l’Islam. A partir du moment où certains d’entre eux s’y refusèrent, les Musulmans avaient le droit de commencer à les tuer et de les forcer à adopter l’Islam. Taha énonce que ce principe reste d’application de nos jours. Il énonce également très clairement que sa définition de la "liberté" se confond avec la charia et que ceux qui abusent de leur liberté en ne vivant pas selon les préceptes de la charia devront affronter le Djihad armé jusqu’à ce qu’ils se soumettent. C’est pour leur bien.
Page 134:
"C’est ainsi que tous les versets de persuasion, bien qu’ils constituent le principe de base ou originel, furent abrogés ou ajournés par les versets de la contrainte (jihad). Cette exception était imposée par les circonstances du temps et de l’insuffisance des capacités humaines à assumer correctement les devoirs de la liberté à cette époque."
"Certains savants musulmans croient que les guerres islamiques furent purement défensives, croyance erronée renforcée par leur désir de réfuter les affirmations des Orientalistes selon lesquelles l’Islam s’est répandu par l’épée. En vérité, l’épée était employée pour limiter les abus de la liberté. L’Islam usa de la persuasion pendant treize ans en adressant aux individus et à la communauté son message clairement valide. Les destinataires ayant failli à assumer correctement les devoirs de leur liberté, ils perdirent cette liberté et le Prophète fut désigné pour être leur gardiens jusqu’à ce qu’ils atteignent la maturité. Cependant, une fois qu'ils embrassaient la nouvelle religion et respectaient la sainteté de la vie et de la propriété et leurs devoirs envers leurs amis et parents, ainsi qu’ils en avaient été instruits, l’épée fut suspendue et les abus de la liberté ont été réprimés par de nouvelles lois. Entraînant le développement de la charia islamique et l’établissement d’un nouveau type de gouvernement. En justification de l’usage de l’épée, nous pourrions la décrire comme le bistouri du chirurgien et non le couteau du boucher. Quand elle était employée avec suffisamment de sagesse, de compassion et de savoir, elle élevait l’individu et purifiait la société."
Page 135:
"La souffrance de la mort par l ‘épée dans cette vie est en réalité l’un des aspects de la souffrance de l’enfer dans la vie suivante, puisque toutes les deux sont la punition de l'incrédulité. Quiconque aggrave son incroyance en incitant les autres à l’incroyance ou à s’écarter du chemin de Dieu doit être éliminé avant qu’il prenne les armes pour la cause de l’incroyance."
Page 136:
"Le principe premier de l’Islam est la liberté. Mais la religion islamique fut révélée dans une société où l’esclavage faisait partie intégrante de l’ordre socioéconomique. C’était aussi une société qui, en pratique, se révéla incapable d’exercer correctement sa liberté et c’est pourquoi ses membres avaient besoin d’une guidance : en conséquence le Djihad fut établi. Dans le Djihad islamique, les Musulmans doivent d’abord offrir la nouvelle religion aux incroyants. S’ils refusaient de l’accepter, il leur était offert la seconde option de payer la jizyah et de vivre sous un gouvernement musulman tout en pratiquant leur propre religion et en jouissant de la sécurité pour leur personne. S’ils refusaient aussi l’option de la jizyah, les Musulmans les combattaient et, si victorieux, prenaient certains d'entre eux comme esclaves, augmentant ainsi le nombre de ceux déjà dans l'esclavage."
"Dans le cas d’un individu invité à devenir l’esclave de Dieu mais qui s’y refuse, un tel refus est symptomatique d’une ignorance qui demande une période d’apprentissage. L’individu se prépare à se soumettre volontairement à la soumission à Dieu en devenant l’esclave d’une autre personne, apprenant l’obéissance et l’humilité qui sied à un esclave. La réciprocité (al-mu'awadah) prévoit ici que si un homme libre refuse de devenir l’esclave de Dieu, en punition honnête et juste, il peut être asservi et fait ainsi esclave de Dieu: « et quiconque fait un mal fût-ce du poids d'un atome, le verra. » (99:8)"
Mon commentaire : Ce passage est l’un des plus choquant de tout le livre. Taha était soudanais, un pays où l’esclavage a encore cours de nos jours. Si Taha avait dit qu’à l’une ou l’autre époque l’esclavage avait existé dans toutes les sociétés humaines j’aurais peut-être pu l’accepter. Mais il va beaucoup plus loin. Il énonce qu’en réalité l’esclavage est moralement bénéfique puisque que c’est une "période d’apprentissage" en vue de devenir un esclave d’Allah, ce que tous les êtres humains devraient être. Imaginez un instant que M. Taha ait été un blanc chrétien et non un noir musulman. Et si, disons, Robert Spencer dans son prochain livre énonçait que l’esclavage aux Etats-Unis était bon parce qu’il a appris aux esclaves l’obéissance et l’humilité. Pensez-vous qu’il aurait été célébré comme un grand exemple de Christianisme modéré et tolérant ? J’en doute. Mais apparemment il n’y a rien "d’extrémiste" à prôner l’esclavage si l’on est un Musulman. Les extrémistes sont les vilains islamophobes comme Geert Wilders.
Page 149:
"L’Islam est si sublime que jusqu’aujourd’hui aucune nation n’y est parvenue. La nation des muslimin n’est pas encore venue. Elle viendra cependant dans le futur de l’humanité."
Mon commentaire : Outre la charia, Taha aime le Communisme, mais il considère que le chemin vers le Communisme parfait passe par la charia. La charia est la clef de l’égalité globale, de al paix eternelle et de la bonne tarte aux pommes. A moins que la tarte aux pommes n’ait d’ici là été interdite : je ne sais pas si elle est halal ou non. Elle pourrait faire partie d’un complot sioniste :
Pages 155-156:
"La clef ici est que nul ne devrait pouvoir posséder quoi que ce soit qui permette l’exploitation du travail d’un citoyen afin d’accroître les revenus d’un autre. La propriété individuelle, même strictement limitée, ne devrait pas être la propriété en tant que telle mais plutôt la propriété des bénéfices tirés de la propriété et toute la propriété devrait demeurer en la possession de Dieu et de la communauté dans son ensemble. À mesure que la production tirée des ressources augmente, l’équité de la distribution se perfectionne et les différences se réduisent en augmentant les revenus minimum et maximum. Mais l'écart entre les revenus minimum et maximum est graduellement réduit afin de réaliser l'égalité absolue. Quand une telle égalité absolue est réalisée par la grâce de Dieu, et en raison de la production abondante, nous aurons atteint le communisme ou partage de la richesse de la Terre entre tous les hommes. Le Communisme ne diffère donc du socialisme qu’en degré, au sens que le socialisme est une étape dans le développement du communisme. Le Prophète expérimenta le communisme final"
Page 156-157:
"…comme le Prophète l’a dit : « la Justice remplira la terre comme elle était précédemment remplie d’injustice. » C’est ce dont Marx rêvait mais il ne parvint pas à découvrir comment y parvenir. Cela ne pourra être accompli que par les al-muslimin qui devront encore venir et alors la Terre jouira d’une forme d’accomplissement du verset : « Certes, les pieux seront dans des jardins avec des sources. Il leur sera dit : "Entrez-y en paix et en sécurité".Et Nous aurons arraché toute rancune de leurs poitrines : et ils se sentiront frères, faisant face les uns aux autres sur des lits, nulle fatigue ne les y touchera et on ne les en fera pas sortir. » (15:45-48) C’est la forme de communisme qui sera accompli par l’Islam à l’avènement de la nation odes muslimin, quand la Terre sera illuminée de la lumière de son Seigneur et que la Grâce de Dieu sera conférée à ses habitants, quand il y aura la paix et le triomphe de l’amour."
Toutes choses égales par ailleurs, je suis d’accord avec Daniel Pipes: Mahmud Muhammud Taha est effectivement un cas intéressant mais précisément pour la raison contraire de ce que M. Pipes affirme. Taha justifie l’esclavage par des considérations morales et non simplement sur le plan historique. Sa "Liberté" se confond avec la charia et revient à être un esclave d’Allah. Ceux qui ne veulent pas accepter l’Islam ou la Loi islamique devront subir le Djihad armé et l’épée doit être employée contre eux comme un "instrument chirurgical" pour les séparer du corps de la société. Et c’est de la modération…..Eh bien…, vraiment ?
Si Taha est le grand espoir de l’Islam modéré, alors nous pouvons en conclure que l’Islam modéré prône l’esclavage, la lapidation à mort pour adultère, le fouet pour ceux qui dégustent un verre de vin ou de bière et le massacre de ceux qui ne sont pas d’accord avec les disposition précitées. Taha soutenait ouvertement nombre des plus épouvantables aspects de la charia et pourtant il était encore considéré comme si sulfureux qu’il fut exécuté en tant qu’apostat.
L’histoire de Mahmud Muhammud Taha est la preuve ultime, définitive et finale qu’il n’y a pas d’Islam modéré. Qu’il n’y en a jamais eu et qu’il n’y en aura jamais. C’est un mythe. Nous ne devrions pas baser nos politiques intérieurs ou extérieures sur l’existence d’un Islam modéré tout comme nous ne devrions pas non plus les baser sur l’existence d’autres créatures mythiques comme le yéti ou la petite souris.
IL est triste de conclure que l’Islam ne peut pas être réformé. Cela ne me plait pas non plus et j’aurais préféré une réponse différente mais je ne discerne aucun indice de l’émergence d’un Islam tolérant et j’ai les plus grandes difficultés à envisager de quoi un tel concept aurait l’air. On peut concevoir de réformer l’Islam de plusieurs manières mais aucunes d’entre elles ne semblent susceptibles de réussir.
J’ai déjà
passé en revue et
critiqué les travaux de Irshad Manji. Bien qu’elle ne le dise jamais aussi explicitement dans
son livre, j’ai l’impression que Manji acquiesce largement à l’incantation que "l’Islam est ce qu’en font les Musulmans." Je ne partage pas ce point de vue. Pourquoi ceux qui en Thaïlande décapitent les instituteurs parce qu’ils sont bouddhistes, brûlent les églises au Nigeria, persécutent les Hindous au Pakistan ou font exploser des bombes dans le métro de Londres ont-ils chaque fois "mal compris" les textes islamiques ? Pourquoi ne ressentent-ils pas ce besoin de tuer des gens après avoir lu, disons, Les aventures de Winnie l’ourson ?
Si le moindre texte était indéfiniment déformable, nous pourrions remplacer le Coran par n’importe quel autre livre et obtenir le même résultat. De toute évidence ce n’est pas le cas. Si vous prenez un texte qui appelle régulièrement à tuer, à la mort et au carnage, la plupart de gens "interpréteront" ce texte dans un sens agressif.
En pratique, l’Islam est la plus agressive et violente religion de la Terre parce que ses textes son plus agressif que ceux des autres religions principales et parce que l’exemple de Mahomet est largement plus violent que ceux des autres fondateurs de religions. Si vous revenez à l’Islam des origines, ce que Manji affirme vouloir, vous obtenez le Djihad puisque l’Islam des origines ne fut que cela.
Les douzaines de versets explicitement djihadistes du Coran ne disparaîtront pas par magie. Aussi longtemps qu’ils existeront des gens les prendront à la lettre. Et puisque tout Islam "réformé" devra fatalement se baser sur les textes Islamiques, cela implique probablement que l’Islam est irréformable.
De toute façon, ce processus de changement n’est pas notre affaire. Les Musulmans doivent s’en occuper tout seuls. Ils sont adultes et doivent résoudre leurs problèmes eux-mêmes comme tout le mondes. C’est pour cette raison que je n’approuve pas la suggestion de Manji qui appelle les infidèles à dépenser leur argent dans des subsides aux Musulmans.
Les Musulmans n’éprouvent pas beaucoup de gratitude si nous finançons leurs hôpitaux ou leurs écoles. Pour eux, toutes les bonnes choses qui surviennent sont de la volonté d’Allah. Les infidèles sont censés payer la jizya aux Musulmans après tout, c’est pourquoi nombre d’entre eux considèrent nos dons comme un signe de soumission. Ce genre de geste les rendrait même plutôt plus arrogants et agressifs que reconnaissant.
Aussi longtemps que les infidèles continueront à les subventionner, les Musulmans n’auront aucune incitation à changer. Ils ne réformeront ou n’abandonneront l’Islam qu’une fois qu’ils seront contraints de faire face à l’arriération provoquée par les enseignements islamiques. C’est pour cela qu’il nous faut une stratégie d’endiguement du monde islamique. C’est un strict minimum. Si les musulmans ont besoin d’argent, qu’ils le demandent à leurs frères saoudiens. Si les Saoudiens devaient financer les hôpitaux de Gaza ou du Pakistan, ils auraient moins d’argent pour financer le terrorisme, ce qui serait une bonne chose. Je suis d’accord avec Hugh Fitzgerald sur ce point.
Il est possible que certaines écoles ou branches de l’Islam soient plus tolérantes que les autres. C’est vrai qu’il y a des différences théologiques entre les Musulmans sunnites et chiites. Elles sont très significatives pour les Musulmans, mais pour les non musulmans elles sont mineures. L’Islam chiite n’est pas plus pacifique ou tolérant que l’Islam sunnite, à l’exception peut-être de la branche ismaélienne, mais ils sont bien moins nombreux que les adhérents du chiisme duodécimain. Alors que les Chiites ne forment qu’une petite minorité des Musulmans de la planète, les Ismaéliens sont une minorité dans la minorité et leur influence est assez marginale.
Mon point de vue est qu’aussi longtemps que l’on prendra pour point de départ les textes utilisés par les Musulmans orthodoxe : le Coran, les hadiths et la sira, il sera à peu près impossible de parvenir à une version pacifique et tolérante de l’Islam. En théorie, il serait possible de changer les choses soit en ajoutant des textes religieux supplémentaires soit en ignorant certains de ceux qui existent déjà. Les deux options sont problématiques.
Puisque Mahomet était censé être le messager final d’Allah, le "sceau des prophètes," quiconque se présentant ensuite pour affirmer apporter de nouvelles révélations à l’humanité sera invariablement considéré comme un imposteur et un hérétique par les Musulmans orthodoxes. C’est ce qui est arrivé au mouvement des Ahmadiyyas qui sont considérés comme des incroyants par la plupart des autres Musulmans, y compris dans la "modérée" Indonésie.
Un autre exemple est la foi Bahaïe qui, effectivement, est bien plus pacifique que la branche principale de l’Islam, mais leur conception de l’Histoire où Bouddha est considéré comme un messager au même titre que Mahomet, s’écarte si radicalement de l’Islam traditionnel qu’on la considère généralement comme une religion distincte. Les Bahaïs sont d’ailleurs cruellement persécutés dans le Monde islamique, particulièrement en Iran d’où le mouvement est originaire. Ils sont considérés comme des Musulmans apostats parce qu’ils remettent en cause le dogme du caractère ultime de la prophétie de Mahomet. Ironiquement, leur institution dirigeante suprême siège
à Haifa, dans le malveillant, raciste et ségrégationniste état d’Israël. C’est ainsi qu’ils sont persécutés par les "tolérants" Musulmans, tandis que les "intolérants" Israéliens les traitent dignement.
Il y a aussi les Musulmans "Coranistes", qui, pour ce que j’en sais, ne sont actuellement qu’un très petit groupe. Ils prônent que les Musulmans devraient ignorer les hadiths et la sira, ne se reposer que sur le Coran pour se guider. Pour cela ils devront d’abord affronter l’opposition déchaînée des autres Musulmans qui auront à leur disposition des arguments théologiques assez dévastateurs. Le Coran lui-même répète continuellement que vous devez obéir à la fois au Coran et à l’exemple de Mahomet. Mais l’exemple personnel de Mahomet et ses compagnons, sa Sunna, est surtout rapporté par des sources extra coraniques comme les hadiths et la sira. Si vous les supprimez, vous supprimez la principale source d’information sur la façon de faire la prière, le pèlerinage, etc. , sur lesquels le Coran ne donne généralement pas grand détails.
Les réformistes"Coranistes", et tous ceux qui aspirent à des réformes,devront être préparés à affronter la possibilité d’être mis au ban de la société en tant qu’hérétiques et apostats, un crime qui peut entraîner la peine de mort selon les lois traditionnelles de la charia. Par-dessus le marché, il existe aussi dans le Coran suffisamment de versets prônant le Djihad et l’intolérance pour que leur alternative reste, elle aussi, problématique. Pour toutes ces raisons, il est peu probable qu’une version "coraniste" de l’Islam puisse jamais être un mouvement de réforme viable à long terme.
Une chercheuse danoise, Tina Magaard, a passé des années à analyser les textes fondateurs des différentes religions, depuis le Bouddhisme jusqu’au Sikhisme, et elle en a conclu que, de toutes les principales religions du monde, les textes islamiques sont de loin les plus bellicistes. Ils encouragent la terreur et le combat à un bien plus grand degré que les textes fondateurs des autres religions. "Les textes de l’Islam se distinguent des textes des autres religions en encourageant à un plus grand degré la violence et l’agression envers les personnes ayant d’autres convictions religieuses. Il y a aussi des appels directs à la terreur. Cela a longtemps été un tabou pour la recherche sur l’Islam, mais c’est un fait auquel nous devons faire face", énonce Magaard. En plus il y a dans le Coran des centaines d’appels à combattre ceux qui ont une autre foi. "S’il est vrai que la majorité des Musulmans considèrent le Coran comme la parole littérale de Dieu, qui ne peut être ni interprétée ni reformulée, alors nous avons un problème. Il est indiscutable que ces textes incitent à la terreur et à la violence. En conséquence, il est raisonnable de demander aux musulmans eux-mêmes comment ils se situent par rapport au texte, si ils le lisent littéralement", dit-elle.
Il a été suggéré que certaines versions régionales de l’Islam, par exemple " l’Islam sud asiatique" sont plus pacifiques que "l’Islam arabe." Primo, en cette époque de globalisation et de parrainage de la théologie la plus conservatrice par l’Arabie Saoudite et compagnie, les interprétations régionales tendent à s’affaiblir et non à se renforcer. Et secundo, je ne suis pas convaincu que l’Islam sud asiatique soit plus tolérant que d’autres formes de cette religion.
Il est exact que, dans certaines parties de l’Indonésie, les Musulmans ont pu être moins stricts que les Musulmans, disons, d’Egypte, mais c’est parce que l’Indonésie ne fut islamisée que plus tard et conservait encore des résidus vivaces de sa culture préislamique. Dans ce genre de cas, nous sommes en présence de "moins d’Islam" ou "d’Islam dilué", ce qui n’est pas la même chose qu’un " Islam modéré" même si certains observateurs le prétendent. En outre, dans ce pays, de nombreuses églises ont été incendiées ou saccagées durant la dernière décennie, ce qui n’indique pas vraiment que l’Indonésie soit un havre de tolérance.
En Thaïlande et aux Philippines, où les Musulmans forment une minorité, des non musulmans sont assassinés ou expulsés de certaines zones par des groupes islamiques qui mènent un Djihad permanent contre les autorités. La ville état de Singapour est cernée par plusieurs centaines de millions de Musulmans et n’arrive à éviter les attaques de l’extérieur qu’en bridant la liberté d’expression de ses citoyens et en interdisant toute critique publique de l’Islam.
La Malaisie a été une raisonnable
success story sur le plan économique parce qu’elle avait une importante et dynamique population non musulmane et que ce n’est que récemment que les musulmans y sont devenus majoritaires. Cela correspond dans une certaine mesure aux premières phases de l’islamisation du Proche Orient. L’Age d’Or de l’Islam fut en réalité les derniers feux jetés par les cultures préislamiques. Les progrès scientifiques de cette période sont surestimés et ceux qui eurent lieux se produisirent surtout dans les premières phases de la domination de l’Islam quand il restait encore d’importantes populations de non musulmans. Au fur et à mesure que ces communautés déclinaient sous les coups du harcèlement musulman, le Proche Orient, patrie de certaines des plus antiques civilisations de la Terre, s’enfonça lentement dans une arriération dont il ne s’est jamais remis.
Le Liban était un pays raisonnablement prospère et civilisé tant qu’il avait encore une légère majorité de Chrétiens, mais, ces dernières décennies, il a rapidement sombré dans le Djihad et la barbarie de la charia suite à la natalité plus élevée des Musulmans et à l’émigration hors du pays des non musulmans. Il est possible qu’un sort semblable attende la Malaisie où les Musulmans deviennent de plus en plus arrogants et agressifs.
Finalement, vous pouvez essayer de réprimer l’Islam et de le museler par la force brute. Ce type de laïcité musclée, imposée par des méthodes qu’aucun pays occidental n’envisagerait de cautionner actuellement, a été inauguré sous Mustafa Kemal Atatürk, fondateur de la République de Turquie. Pourtant la Turquie n’a jamais été un parangon de tolérance et les très rares non musulmans qui restent dans ce pays continuent à y être harcelés. Le Kémalisme a tenu l’Islam en bride mais ne l’a jamais vraiment réformé. Et même, au bout d’un siècle, l’Islam est en train de faire son grand retour. Il y a de graves lézardes sur la façade laïque et certains observateurs redoutent une révolution Islamique dans ce pays.
L’exemple Turc n’est donc pas si prometteur. Nous devrions également nous rappeler que l’ Iran aussi était perçu comme un pays modéré et moderne jusqu’à ce que la révolution amène l’Ayatollah Khomeiny au pouvoir en 1979. La leçon que nous pouvons en tirer est que l’Islam est capable de rester en sommeil pendant des générations avant de frapper de nouveau avec une vigueur renouvelée quand l’occasion s’en présente.
Le débat sur un Islam "réformé" est en outre erronément teinté d’une perspective historique occidentale se référant à la Réforme Protestante de l’Europe du seizième siècle. Cela implique indirectement qu’il y aurait certaines équivalences entre le Christianisme et l’Islam. Je n’en crois rien bien que je ne sois pas chrétien. Avec son concept de la trinité, le Christianisme s’apparente à un polythéisme doux du point de vue islamique. Leurs textes religieux sont clairement différents, sans parler des exemples personnels des fondateurs de ces deux religions, Jésus et Mahomet. L’Islam est devenu l’une des principales religions du monde par des guerres de conquête et la création d’un empire. Le Christianisme devenu l’une des principales religions du monde en s’emparant graduellement d’un empire déjà établis, l’Empire Romain.
La lente croissance du Christianisme au sein d’un contexte gréco-romain a permis aux Chrétiens d’assimiler la philosophie grecque et les lois romaines à un point que les musulmans n’ont jamais atteint, même dans le Monde Méditerranéen qui avait été dominé par les Romains. Cela eut des conséquences majeures pour le développement de la pensée scientifique et politique en Europe et au Proche Orient. Le contact avec les traditions scientifiques des Grecs et des autres peuples entraîna certaines avancées dans les premiers siècles de la domination islamique mais la philosophie naturelle grecque ne fut jamais acceptée dans le curriculum de base des madrasas islamiques au degré où elle l’était dans les universités européennes.
Quand, au dix-huitième siècle, les Pères Fondateurs américains débattirent de la forme que devrait prendre leur jeune République, outre les penseurs modernes et le système parlementaire Britannique, ils furent influencés, via les textes politiques d’Aristote et les écrits de Cicéron, par les descriptions de la démocratie athénienne et de la République romaine. Aucun de ces textes n’a jamais été disponible en traductions arabes ou perses. Ils furent rejetés par les Musulmans mais préservés, traduits et étudiés avec le plus grand intérêt par les Chrétiens. L’héritage artistique des Grecs fut lui aussi largement rejeté par les Musulmans. En bref, les Occidentaux ne partagent pas "de racines Gréco-romaines" avec les Musulmans. Ils ne s’intéressaient surtout qu’à une partie de ce grand héritage, le domaine scientifico-philosophique, et même cette partie, ils échouèrent à l’assimiler.
Les différences théologiques entre, d’une part, le Christianisme et le Judaïsme et, d’autre part, l’Islam sont immenses. Comme Robert Spencer l’explique dans son excellent opuscule
Religion of Peace?: Why Christianity Is and Islam Isn't, dans le Christianisme le centre de la doctrine est que "tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu" (Romains 3:23). Tout en reconnaissant que tout être humain est capable de faire le mal, le Coran dit que les Musulmans sont "la meilleure communauté" (3:110) alors que les incroyants sont "les pires des créatures" (98:6). Avec une telle conception du monde, il est facile de voir le mal chez les autres mais difficile de le reconnaître chez soi. Le coran dit aussi que les adeptes de Mahomet sont "durs envers les mécréants mais miséricordieux entre eux" (48:29) et que les incroyants sont les "les pires des créatures" (98:6). On peut appliquer la Règle d’Or dans ses relations avec un frère Musulman, mais selon les lois de l’Islam cette courtoisie ne doit pas s’étendre aux incroyants.
Bien sûr, vous trouverez des passages violents dans la Bible hébraïque, comme ceux relatifs à la conquête de Jéricho dans le livre de Josué, mais "historiquement, plutôt que de célébrer ce genre de passages de la bible, les Juif et les Chrétiens les ont considérés comme des problèmes à résoudre. Bien que les interprétations de ces passages diffèrent largement entre les Juifs et les Chrétiens, depuis les débuts du Judaïsme rabbinique et du Christianisme une interprétation est restée dominante parmi pratiquement tous les croyants : ces passages ne sont pas des commandements pour les générations à venir, et s’ils ont une quelconque application c’est uniquement dans un sens spirituel, métaphorique."
Comme dit Spencer : "depuis des siècles, le consensus chez les Juifs et les Chrétiens est qu’à moins que vous soyez Hittite, Girgashite, Amorite, Canaanite, Perizzite, Hivite ou Jebusite, ces passages bibliques ne vous concernent tout simplement pas. Les écritures rapportent les ordres donnés par Dieu aux Israélites de faire la guerre à certains peuples particuliers. Quelle que soit la façon dont on les comprend, et quelque choquants qu’ils soient pour les sensibilités modernes, ils ne constituent en aucun cas un appel général au combat lancé aux croyants. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles les Juifs et les Chrétiens n’ont pas formé partout dans le monde des groupes terroristes citant la Bible pour justifier le meurtre de non combattants."
Le problème principal avec l’Islam n’est pas que c’est une religion stupide, comme certains l’affirment, mais que c’est une religion violente et agressive. Je considère la Scientologie comme une croyance incroyablement stupide mais je n’ai pas entendu dire que des gens vivent dans la terreur que Tom Cruise vienne leur couper la tête en récitant des poèmes de L. Ron Hubbard pour ensuite poster une vidéo de son crime sur Internet.
Oui, les religions évoluent. La lapidation à mort était autrefois pratiquée par les Juifs, mais ils ont progressé et rejeté cette pratique parce qu’ils la considéraient cruelle, ce qui est le cas. Le problème est qu’il y a littéralement des douzaines, plus d’une centaine selon la manière dont vous les comptez, de versets appelant au Djihad dans le Coran, et d’autres encore dans les hadiths. Toute forme "tolérante" de l’Islam serait obligée de rejeter définitivement tous ces versets en plus de l’exemple personnel de Mahomet et de ses compagnons et d’un énorme corpus d’écrits dérivés produits en plus d’un millier d’années par les commentateurs de la charia. Vaste programme. Nous devons aussi nous rappeler que le but ultime de l’Islam n’est pas le Djihad mais la Charia. Le Djihad est un outil pour parvenir à la charia et à la domination de la Loi islamique sur l’ensemble de l’humanité.
Ainsi que je l’ai expliqué dans mon précédent article
Do we want an Islamic Reformation ? et dans l’ouvrage en ligne
Is Islam Compatible With Democracy?, la question de savoir si l’Islam est compatible avec la démocratie dépend largement de votre définition du mot "démocratie." Si cela signifie simplement voter, sans disposer de la liberté d’expression ni de garanties des droits individuels ou de ceux des minorités alors oui, la démocratie est compatible avec l’Islam en tant que moyen d’imposer la charia à l’ensemble de la société. Mais une si "pure" démocratie n’est pas nécessairement un bon système avec ou sans l’Islam d’ailleurs, ainsi que, de Platon à Thomas Jefferson, des critiques l’ont argué de manière assez convaincante.
De même, la question de savoir si l’Islam peut être réformé dépend largement de votre définition du mot "Réforme." Je dis généralement que l’Islam est irréformable et par "réforme" j’entends quelque chose qui rime avec "pacifique, non basé sur la charia, respectant les choix individuels et la liberté d’expression." En d’autres mots : "réforme" signifie à peu près moins d’Islam.
Cependant,
Robert Spencer et d’autres ont argué qu’il existe des similitudes entre Martin Luther et la Réforme dans l’Europe du 16ième siècle et le mouvement réformiste lancé au 18ième siècle dans la péninsule arabe par Muhammad ibn Abdul Wahhab. L’alliance entre Wahhab et le chef régional Muhammad bin Saoud et sa famille aboutit par la suite à la création de l’Arabie Saoudite. L’autre mouvement de "réforme" moderne, baptisé Salafisme, fut initié par des penseurs du 19ième siècle comme Jamal al-Din al-Afghani et Muhammad Abduh. Si le premier (le Wahhabisme) était un mouvement de réforme interne suscité par des appels à l’éradication de la "corruption" de la société, le second était clairement une réponse aux pressions externes occidentales.
Quoique les idées d’Abduh aient été développées dans une orientation laïque par des personnalités comme l’écrivain égyptien Taha Hussein, il est clair que les branches les plus vigoureuses furent celles qui se développèrent en ce qui fut par la suite baptisé "fondamentalisme Islamique" au 20ième siècle. Rashid Rida, un élève de Muhammad Abduh, fut l’inspirateur de Hassan al-Banna fondateur des Frères Musulmans. Tout comme Abduh, Rida adjurait les Musulmans de ne pas imiter les infidèles mais de revenir à l’Age d’Or de l’Islam des origines. Rida prônait également la restauration du Califat et applaudit quand les Wahhabites conquirent La Mecque et Médine et fondèrent l’actuelle Arabie Saoudite. Les deux mouvements de réforme fusionnèrent donc partiellement au 20ième siècle dans des organisations comme les Frères Musulmans.
Le fait que deux mouvements de réforme d’origines distinctes, lancés dans des circonstances et pour des raisons différentes, aient abouti à des résultats assez similaires mérite que l’on s’y attarde. Les réformistes protestants comme Martin Luther et Jean Calvin appelaient eux aussi à un retour à l’Age d’Or du Christianisme des origines. Bien que la période de la Réforme ait été une époque troublée, sur le long terme elle a ouvert la voie à plus de tolérance et de liberté religieuse dans l’Europe chrétienne. Ce fut, à mon avis, au moins partiellement parce que les Chrétiens pouvaient revenir à l’exemple, tel que rapporté par les Evangiles, d’un premier âge où le fondateur de leur religion et ses disciples menaient un mouvement largement pacifique et séparé de l’Etat. Les Musulmans, par contre, ne peuvent trouver un exemple similaire que dans la période mecquoise. Aussi longtemps que les écrits de la période de violence médinoise resteront en vigueur, un retour à "L’Age d’Or des Origines" de l’Islam signifiera un a retour à l’intolérance et à la violence du Djihad.
Certains observateurs occidentaux sont à la recherche d’un "Martin Luther musulman" qui mette fin à la résurgence du Djihad islamique. Mais l’on pourrait faire valoir qu’il y a déjà un Martin Luther musulman : il s’appelle Osama bin Laden, et il est profondément inspiré par les enseignements de Sayyid Qutb, l’idéologue des Frères Musulmans. Si le terme "réforme" est pris dans le sens de retour à la période historique du fondateur de la religion, Mahomet et ses compagnons, cela mènera inévitablement à un regain de violence djihadiste puisque Mahomet et ses compagnons n’étaient que cela.
La question de savoir si l’Islam est réformable est importante. Mais la vraie question est peut-être de savoir si une Réforme de l’Islam est souhaitable d’un point de vue non musulman et la réponse la plus probable est "non."