Les meilleures citations

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Aucune soumission ni reddition jusqu'à la chute d'Islam


Un peuple qui élit des corrompus, des renégats, des imposteurs, des voleurs et des traîtres n'est pas victime ! Il est complice.
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yacoub
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L’islam et la science (E. Renan, 1883)

César tient à porter à la connaissance des lecteurs de Disons ce texte, qui nous a été signalé par Iskender. Il s’agit d’une conférence d’Ernest Renan qui date de 1883.
Certes, nous sommes au XIX e siècle et Renan n’échappe pas à des explications racialistes aujourd’hui scientifiquement dépassées (tout en leur accordant une place qu’il minimise lui-même). Mais on retiendra la remarquable qualité factuelle et historique, confirmée par la recherche contemporaine, qui a ajouté quelques chapitres supplémentaires, comme la traite négrière musulmane ou une relativisation de la transmission exclusive par les arabes du savoir antique.
Quant aux jugements qu’E. Renan porte sur l’Islamisme, le lecteur appréciera lui-même s’ils ont pris une ride.

Le texte est un peu long, mais malgré quelques tentatives, il a semblé impossible de n’en donner que des extraits, tout y est intéressant.
Cette conférence a donné lieu à un échange entre l’historien et un intellectuel musulman, qu’on vous invite également à suivre ici. (textes 3 et 4 qui font suite à celui-ci).


César
———————————————————————————
L’ISLAM ET LA SCIENCE
Mesdames et Messieurs,

J’ai déjà tant de fois fait l’épreuve de l’attention bienveillante de cet auditoire que j’ai osé choisir, pour le traiter aujourd’hui devant vous, un sujet des plus subtils, rempli de ces distinctions délicates où il faut entrer résolument quand on veut faire sortir l’histoire du domaine des à-peu-près. Ce qui cause presque toujours les malentendus en histoire, c’est le manque de précision dans l’emploi des mots qui désignent les nations et les races. On parle des Grecs, des Romains, des Arabes comme si ces mots désignaient des groupes humains, toujours identiques à eux-mêmes, sans tenir compte des changements produits par les conquêtes militaires, religieuses, linguistiques, par la mode et les grands courants de toute sorte qui traversent l’histoire de l’humanité. La réalité ne se gouverne pas selon des catégories aussi simples. Nous autres Français, par exemple, nous sommes Romains par la langue, Grecs par la civilisation, Juifs par la religion. Le fait de la race, capital à l’origine, va toujours perdant de son importance à mesure que les grands faits universels qui s’appellent civilisation grecque, conquête romaine, conquête germanique, christianisme, islamisme, renaissance, philosophie, révolution, passent comme des rouleaux broyeurs sur les primitives variétés de la famille humaine et les forcent à se confondre en masses plus ou moins homogènes.
Je voudrais essayer de débrouiller avec vous une des plus fortes confusions d’idées que l’on commette dans cet ordre, je veux parler de l’équivoque contenue dans ces mots science arabe, philosophie arabe, art arabe, science musulmane, civilisation musulmane. Des idées vagues qu’on se fait sur ce point résultent beaucoup de faux jugements et même des erreurs pratiques quelquefois assez graves.
Toute personne un peu instruite des choses de notre temps voit clairement l’infériorité actuelle des pays musulmans, la décadence des États gouvernés par l’islam, la nullité intellectuelle des races qui tiennent uniquement de cette religion leur culture et leur éducation. Tous ceux qui ont été en Orient ou en Afrique sont frappés de ce qu’a de fatalement borné l’esprit d’un vrai croyant, de cette espèce de cercle de fer qui entoure sa tête, la rend absolument fermée à la science; incapable de rien apprendre ni de s’ouvrir à aucune idée nouvelle. À partir de son initiation religieuse, vers l’âge de dix ou douze ans l’enfant musulman, jusque-là quelquefois assez éveillé, devient tout à coup fanatique, plein d’une sotte fierté de posséder ce qu’il croit la vérité absolue, heureux comme d’un privilège de ce qui fait son infériorité.

Ce fol orgueil est le vice radical du musulman. L’apparente simplicité de son culte lui inspire un mépris peu justifié pour les autres religions. Persuadé que Dieu donne la fortune et le pouvoir à qui bon lui semble, sans tenir compte de l’instruction ni du mérite personnel, le musulman a le plus profond mépris pour l’instruction, pour la science, pour tout ce qui constitue l’esprit européen. Ce pli inculqué par la foi musulmane est si fort que toutes les différences de race et de nationalité disparaissent par le fait de sa conversion à l’islam. Le Berbère, le Soudanien, le Circassien, l’Afghan, le Malais, l’Égyptien, le Nubien, devenus musulmans, ne sont plus des Berbères, des Soudaniens, des Égyptiens, etc., ce sont des musulmans. La Perse seule fait ici exception ; elle a su garder son génie propre, car la Perse a su prendre dans l’Islam une place à part ; elle est au fond bien plus chiite que musulmane.

Pour atténuer les fâcheuses inductions qu’on est porté à tirer de ce fait si général, contre l’islam, beaucoup de personnes font remarquer que cette décadence, après tout, peut n’être qu’un fait transitoire. Pour se rassurer sur l’avenir, elles font appel au passé. Cette civilisation musulmane, maintenant si abaissée a été autrefois très brillante. Elle a eu des savants, des philosophes. Elle a été pendant des siècles la maîtresse de l’Occident chrétien. Pourquoi ce qui a été ne serait-il pas encore ? Voilà le point précis sur lequel je voudrais faire porter le débat. Y a-t-il eu réellement une science musulmane, ou du moins une science admise par l’islam, tolérée par l’islam ?
Il y a, dans les faits qu’on allègue, une très réelle part de vérité. Oui ; de l’an 775 à peu près jusque vers le milieu du treizième siècle, c’est-à-dire pendant 500 ans environ, il y a eu dans les pays musulmans des savants, des penseurs très distingués. On peut même dire que, pendant ce temps, le monde musulman a été supérieur pour la culture intellectuelle au monde chrétien. Mais il importe de bien analyser ce fait pour n’en pas tirer des conséquences erronées. Il importe de suivre siècle par siècle l’histoire de la civilisation en Orient pour faire la part des éléments divers qui ont amené cette supériorité momentanée, laquelle s’est bientôt changée en une infériorité tout à fait caractérisée.

Rien de plus étranger à tout ce qui peut s’appeler philosophie ou science que le premier siècle de l’islam. Résultat d’une lutte religieuse qui durait depuis plusieurs siècles et tenait la victoire indécise entre les diverses formes du monothéisme sémitique qui se disputaient la conscience de l’Arabie, l’islam est à mille lieues de tout ce qui peut s’appeler rationalisme ou science. Les cavaliers arabes qui s’y attachèrent comme à un prétexte pour conquérir et piller furent, à leur heure, les premiers guerriers du monde, mais c’étaient assurément les moins philosophes des hommes. Un écrivain oriental du treizième siècle, Aboulfaradj, traçant le caractère du peuple arabe, s’exprime ainsi : « La science de ce peuple, celle dont il se faisait gloire, était la science de la langue, la connaissance de ses idiotismes, la texture des vers, l’habile composition de la prose. Quant à la philosophie, Dieu ne lui en avait rien appris, et ne l’y avait pas rendu propre. » Rien de plus vrai. L’Arabe nomade est de tous les hommes le moins mystique, le moins porté à la méditation. L’Arabe religieux se contente, pour l’explication des choses, d’un Dieu créateur, gouvernant le monde directement et se révélant à l’homme par des prophètes successifs. Aussi, tant que l’islam fut entre les mains de la race arabe, c’est-à-dire sous les quatre premiers califes et sous les Omeyyades, ne se produisit-il dans son sein aucun mouvement intellectuel d’un caractère profane. Omar n’a pas brûlé, comme on le répète souvent, la bibliothèque d’Alexandrie ; mais le principe qu’il a fait triompher dans le monde était bien en réalité destructeur de la recherche savante et du travail varié de l’esprit.
Tout fut changé, quand, vers l’an 750, la Perse prit le dessus et fit triompher la dynastie des enfants d’Abbas sur celle, des Beni-Omeyya [Omeyyades]. Le centre de l’islam se trouva transporté dans la région du Tigre et de l’Euphrate. Or, ce pays était plein encore des traces d’une des plus brillantes civilisations que l’Orient ait connues, celle des Perses Sassanides, qui avait été portée à son comble sous le règne de Chosroès Nouschirvan. L’art et l’industrie florissaient en ces pays depuis des siècles, Chosroès y ajouta l’activité intellectuelle. La philosophie, chassée de Constantinople, vint se réfugier en Perse ; Chosroès fit traduire les livres de l’Inde. Les chrétiens nestoriens, qui formaient l’élément le plus considérable, de la population, étaient versés dans la science et la philosophie grecques ; la médecine était tout entière entre leurs mains ; leurs évêques étaient des logiciens, des géomètres. Dans les épopées persanes, dont la couleur locale est empruntée aux temps sassanides, quand Roustem veut faire bâtir un pont, il fait venir un djathalik (catholicos, nom des patriarches ou évêques nestoriens) en guise d’ingénieurs.

Le terrible coup de vent de l’islam arrêta net, pendant une centaine d’années, tout ce beau développement iranien. Mais l’avènement des Abbassides sembla une résurrection de l’éclat des Chosroès. La révolution qui porta cette dynastie au trône fut faite par des troupes persanes, ayant des chefs persans. Ses fondateurs, Aboul-Abbas et surtout Mansour, sont toujours entourés de Persans. Ce sont en quelque sorte des Sassanides ressuscités ; les conseillers intimes, les précepteurs des princes, les premiers ministres sont les Barmékides, famille de l’ancienne Perse, très éclairée, restée fidèle au culte national, au parsisme, et qui ne se convertit à l’islam que tard et sans conviction. Les nestoriens entourèrent bientôt ces califes peu croyants, et devinrent, par une sorte de privilège exclusif, leurs premiers médecins. Une ville qui a eu dans l’histoire de l’esprit humain un rôle tout fait à part, la ville de Harran, était restée païenne, et avait gardé toute la tradition scientifique de l’antiquité grecque ; elle fournit à la nouvelle école un contingent considérable de savants étrangers aux religions révélées, surtout d’habiles astronomes.
Bagdad s’éleva comme la capitale de cette Perse renaissante. La langue de la conquête, l’arabe, ne put être supplantée, non plus que la religion tout à fait reniée ; mais l’esprit de cette nouvelle civilisation fut essentiellement mixte. Les Parsis, les chrétiens l’emportèrent ; l’administration, la police en particulier, fut entre les mains des chrétiens. Tous ces brillants califes, contemporains de nos Carolingiens, Mansour, Haroun al-Rachid, Mamoum sont à peine musulmans. Ils pratiquent extérieurement la religion dont ils sont les chefs, les papes, si l’on peut s’exprimer ainsi ; mais leur esprit est ailleurs ! Ils sont curieux de toute chose, surtout des choses exotiques et païennes ; ils interrogent l’Inde, la vieille Perse, la Grèce surtout. Parfois, il est vrai, les piétistes musulmans amènent à la cour d’étranges réactions ; le calife, à certains moments, se fait dévot et sacrifie ses amis infidèles ou libres penseurs puis le souffle du libre esprit reprend le dessus ; alors le calife rappelle ses savants et ses compagnons de plaisir, et la libre vie recommence, au grand scandale des musulmans puritains.

Telle est l’explication de cette curieuse et attachante civilisation de Bagdad, dont les fables des Mille et une nuits, ont fixé l’image dans toutes les imaginations ; mélange bizarre de rigorisme officiel et de secret relâchement, âge de jeunesse et d’inconséquence, où les arts sérieux et les arts de la vie joyeuse fleurissent grâce à la protection des chefs mal pensants d’une religion fanatique ; où le libertin, bien que toujours sous la menace des plus cruels châtiments était flatté, recherché à la cour. Sous le règne ce ces califes, parfois tolérants, parfois persécuteurs à regret, la libre pensée se développa ; les motecallemîn ou « disputeurs » tenaient des séances où toutes les religions étaient examinées d’après la raison. Nous avons en quelque sorte le compte rendu d’une de ces séances fait par un dévot.
Permettez-moi de vous le lire tel que M. Dozy l’a traduit.

« Un docteur de Kairoan demande à un pieux théologien espagnol, qui, avait fait le voyage de Bagdad, si, pendant son séjour dans cette ville, il avait assisté aux séances de ces motecallemîn. « J’y ai assisté deux fois, répond l’Espagnol ; mais je me suis bien gardé à y retourner. – Et pourquoi ? lui demanda son interlocuteur. – Vous allez en juger, répondit le voyageur. À la première séance à laquelle j’assistai, se trouvaient non seulement des musulmans de toute sorte, orthodoxes et hétérodoxes mais aussi des mécréants, des guèbres, des matérialistes, des athées, des juifs, des chrétiens ; bref, il y avait des incrédules de toute espèce. Chaque secte avait son chef, chargé de défendre les opinions qu’elle professait, et, chaque fois qu’un de ces chefs entrait dans la salle, tous se levaient en signe de respect, et personne ne reprenait sa place avant que ce chef se fût assis. La salle fut bientôt comble, et, lorsqu’on se vit au complet, un des incrédules prit la parole : « Nous sommes réunis pour raisonner, dit-il. Vous connaissez tous les conditions. Vous autres, musulmans, vous ne nous alléguerez pas des raisons tirées de votre livre ou fondée sur l’autorité de votre Prophète ; car nous ne croyons ni à l’un ni à l’autre. Chacun doit se borner à des arguments tirés de la raison. ». Tous applaudirent à ces paroles. Vous comprenez, ajoute l’Espagnol, qu’après avoir entendu de telles choses, je ne retournai plus dans cette assemblée. On me proposa d’en visiter une autre ; mais c’était le même scandale. »

Un véritable mouvement philosophique et scientifique fut la conséquence de ce ralentissement momentané de la rigueur orthodoxe. Les médecins syriens chrétiens, continuateurs des dernières écoles grecques, étaient fort versés dans la philosophie péripatéticienne, dans les mathématiques, dans la médecine, l’astronomie. Les califes les employèrent à traduire en arabe l’encyclopédie d’Aristote, Euclide, Galien, en un mot tout l’ensemble de la science grecque tel qu’on le possédait alors. Des esprits actifs, tels qu’Alkindi, commencèrent à spéculer sur les problèmes éternels que l’homme se pose sans pouvoir les résoudre. On les appela filsouf (philosophos), et dès lors ce mot exotique fut pris en mauvaise part comme désignant quelque chose d’étranger à l’islam. Filsouf devint chez les musulmans une appellation redoutable, entraînant souvent la mort ou la persécution, comme zendik et plus tard farmaçoun (franc-maçon).

C’était, il faut l’avouer, le rationalisme le plus complet qui se produisait au sein de l’islam. Une sorte de société philosophique, qui s’appelait les Ikhwan es-safa, « les frères de la sincérité », se mit à publier une encyclopédie remarquable par la sagesse et l’élévation des idées. Deux très grands hommes, Alfarabi et Avicenne, se placent bientôt au rang des penseurs les plus complets qui aient existé. L’astronomie et l’algèbre prennent, en Perse surtout, de remarquables développements. La chimie poursuit son lent travail souterrain, qui se révèle au dehors par d’étonnants résultats, tels que la distillation, peut-être la poudre. L’Espagne musulmane se met à ces études à la suite de l’Orient ; les juifs y apportent une collaboration active. Ibn-Badja, Ibn-Tofaïl, Averroès élèvent la pensée philosophique, au douzième siècle, à des hauteurs où, depuis des siècles, on ne l’avait point vue portée.

Tel est ce grand ensemble philosophique, que l’on a coutume d’appeler arabe, parce qu’il est écrit en arabe, mais qui est en réalité gréco-sassanide. Il serait plus exact de dire grec ; car l’élément vraiment fécond de tout cela venait de la Grèce. On valait, dans ces temps d’abaissement, en proportion de ce qu’on savait de la vieille Grèce. La Grèce était la source unique du savoir et de la droite pensée. La supériorité de la Syrie et de Bagdad sur l’Occident latin venait uniquement de ce qu’on y touchait de bien plus près la tradition grecque. Il était plus facile d’avoir un Euclide, un Ptolémée, un Aristote, à Harran, à Bagdad, qu’à Paris. Ah ! si les Byzantins avaient voulu être gardiens moins jaloux des trésors qu’à ce moment ils ne lisaient guère ; si, dès le huitième ou le neuvième siècle, il y avait eu des Bessarion et des Lascaris ! On n’aurait pas eu besoin de ce détour étrange qui fit que la science grecque nous arriva, au douzième siècle, en passant par la Syrie, par Bagdad, par Cordoue, par Tolède. Mais cette espèce de providence secrète qui fait que, quand le flambeau de l’esprit humain va s’éteindre entre les mains d’un peuple, un autre se trouve là pour le relever et le rallumer, donna une valeur de premier ordre à l’œuvre, sans cela obscure, de ces pauvres Syriens, de ces filsouf persécutés, de ces Harraniens que leur incrédulité mettait au ban de l’humanité d’alors. Ce fut par ces traductions arabes des ouvrages de science et de philosophie grecque que l’Europe reçut le ferment d’une tradition antique nécessaire à l’éclosion de son génie. En effet, pendant qu’Averroès, le dernier philosophe arabe, mourait à Maroc, dans la tristesse et l’abandon, notre Occident était en plein éveil. Abélard a déjà poussé le cri du rationalisme renaissant.
L’Europe a trouvé son génie et commence cette évolution extraordinaire, dont le dernier terme sera la complète émancipation de l’esprit humain. Ici, sur la montagne Sainte-Geneviève, se créait un sensorium nouveau pour le travail de l’esprit. Ce qui manquait, c’étaient les livres, les sources pures de l’antiquité. Il semble au premier coup d’œil qu’il eût été plus naturel d’aller les demander aux bibliothèques de Constantinople où se trouvaient les originaux, qu’à des traductions souvent médiocres en une langue qui se prêtait peu à rendre la pensée grecque. Mais les discussions religieuses avaient créé entre le monde latin et le monde grec une déplorable antipathie ; la funeste croisade de 1204 ne fit que l’exaspérer. Et, puis, nous n’avions pas d’hellénistes, il fallait encore attendre 300 ans pour que nous eussions un Lefèvre d’Etaples, un Budé.
À défaut de la vraie philosophie grecque authentique, qui était dans les bibliothèques byzantines, on alla donc chercher en Espagne une science grecque mal traduite et frelatée. Je ne parlerai pas de Gerbert, dont les voyages parmi les musulmans sont chose fort douteuse ; mais, dès le onzième siècle, Constantin l’Africain est supérieur, en connaissances, à son temps et à son pays, parce qu’il a reçu une éducation musulmane. De 1130 à 1450, un collège actif de traducteurs, établi à Tolède sous le patronage de l’évêque Raymonde, fait passer en latin les ouvrages les plus importants de la science arabe. Dès les premières années, l’Aristote arabe fait dans l’Université de Paris son entrée triomphante. L’Occident a secoué son infériorité de quatre ou cinq cents ans. Jusqu’ici l’Europe a été scientifiquement tributaire des musulmans. Vers le milieu du treizième siècle, la balance est incertaine encore. À partir de 1275 à peu près, deux mouvements apparaissent avec évidence : d’une part, les pays musulmans s’abîment dans la plus triste décadence intellectuelle ; de l’autre, l’Europe occidentale entre résolument pour son compte dans cette grande voie de la recherche scientifique et de la vérité, courbe immense dont l’amplitude ne peut pas encore être mesurée.

Malheur à qui devient inutile au progrès humain, il est supprimé presque aussitôt. Quand la science dite arabe a inoculé son germe de vie à l’Occident latin, elle disparaît. Pendant qu’Averroès arrive dans les écoles latines à une célébrité presque égale à celle d’Aristote, il est oublié chez ses coreligionnaires. Passé l’an 1200 à peu près, il n’y a plus un seul philosophe arabe de renom. La philosophie avait toujours été persécutée au sein de l’islam, mais d’une façon qui n’avait pas réussi à la supprimer. À partir de 1200, la réaction théologique l’emporte tout à fait. La philosophie est abolie dans les pays musulmans. Les historiens et les polygraphes n’en parlent que comme d’un souvenir, et d’un mauvais souvenir. Les manuscrits philosophiques sont détruits et deviennent rares. L’astronomie n’est tolérée que pour la partie qui sort à déterminer la direction de la prière. Bientôt la race turque prendra l’hégémonie de l’islam, et à de quelques rares exceptions près, comme Ibn-Khaldoun, l’islam ne comptera plus aucun esprit large ; il a tué la science et là philosophie dans son sein.
Je n’ai point cherché, Messieurs, à diminuer le rôle de cette grande science dite arabe qui marque une étape si importante dans l’histoire de l’esprit humain. On en a exagéré l’originalité sur quelques points, notamment en ce qui touche l’astronomie ; il ne faut pas verser dans l’autre excès, en la dépréciant outre mesure. Entre la disparition de la civilisation antique, au sixième siècle, et la naissance du génie européen au douzième et au treizième, il y a eu ce qu’on peut appeler la période arabe, durant laquelle la tradition de l’esprit humain s’est faite par les régions conquises à l’islam.

Cette science dite arabe, qu’a-t-elle d’arabe en réalité ? La langue, rien que la langue. La conquête musulmane avait porté la langue de l’Hedjaz jusqu’au bout du monde. Il arriva pour l’arabe ce qui est arrivé pour le latin, lequel est devenu, en Occident, l’expression de sentiments et de pensées qui n’avaient rien à faire avec le vieux Latium. Averroès, Avicenne, Albaténi sont des Arabes comme Albert le Grand, Roger Bacon, François Bacon, Spinoza sont des Latins. Il y a un aussi grand malentendu à mettre la science et la philosophie arabes au compte de l’Arabie qu’à mettre toute la littérature chrétienne latine, tous les scolastiques, toute la Renaissance, toute la science du seizième et en partie du dix-septième siècle au compte de la ville de Rome, parce que tout cela est écrit en latin.
Ce qu’il y a de bien remarquable, en effet, c’est que, parmi les Philosophes et les savants dits arabes, il n’y en a guère qu’un seul, Alkindi, qui soit d’origine arabe, tous les autres sont des Persans, des Transoxiens, des Espagnols, des gens de Bokhara, de Samarkande, de Cordoue, de Séville. Non seulement, ce ne sont pas des Arabes de sang ; mais ils n’ont rien d’arabe d’esprit. Ils se servent de l’arabe ; mais ils en sont gênés, comme les penseurs du moyen âge sont gênés par le latin et le brisent à leur usage. L’arabe, qui se prête si bien à la poésie, est un instrument fort incommode pour la métaphysique. Les philosophes et les savants arabes sont en général d’assez mauvais écrivains.

Cette science n’est pas arabe. Est-elle du moins musulmane ? L’islamisme a-t-il offert à ces recherches rationnelles quelque secours tutélaire ? Oh! en aucune façon ? Ce beau mouvement d’études est tout entier l’œuvre de parsis, de chrétiens, de juifs, de harraniens, d’ismaéliens, de musulmans intérieurement révoltés contre leur propre religion. Il n’a recueilli des musulmans orthodoxes que des malédictions. Mamoun, celui des califes qui a montré le plus de zèle pour l’introduction de la philosophie grecque, fut damné sans pitié par les théologiens ; les malheurs qui affligèrent son règne furent présentés comme des punitions de sa tolérance pour des doctrines étrangères à l’islam. Il n’était pas rare que, pour plaire la multitude, ameutée par les imams, on brûlât sur les places publiques, on jetât dans les puits et les citernes les livres de philosophie, d’astronomie. Ceux qui cultivaient ces études étaient appelés zendiks (mécréants) ; on les frappait dans les rues, on brûlait leurs maisons, et souvent l’autorité, pour complaire à la foule, les faisait mettre à mort. L’islamisme, en réalité, a donc toujours persécuté la science et la philosophie. Il a fini par les étouffer. Seulement, il faut distinguer à cet égard deux périodes dans l’histoire de l’islam, l’une depuis ses commencements jusqu’au douzième siècle, l’autre depuis le treizième siècle jusqu’à nos jours.
Dans la première période, l’islam, miné par les sectes et tempéré par une espèce de protestantisme (ce qu’on appelle le motazélisme) est bien moins organisé et moins fanatique qu’il ne l’a été dans la seconde moitié du second âge, quand il est tombé entre les mains des races tartares et berbères, races lourdes, brutales et sans esprit. L’islamisme offre cette particularité qu’il a obtenu de ses adeptes une foi toujours de plus en plus forte. Les premiers Arabes qui s’engagèrent dans le mouvement croyaient à peine en la mission du Prophète. Pendant deux ou trois siècles, l’incrédulité est à peine dissimulée.

Puis vient le règne absolu du dogme, sans aucune séparation possible du spirituel et du temporel ; le règne avec coercition et châtiments corporels pour celui qui ne pratique pas ; un système, enfin, qui n’a guère été dépassé, en fait de vexations, que par l’Inquisition espagnole. Là liberté n’est jamais plus profondément blessée que par une organisation sociale où le dogme règne et domine absolument la vie civile. Dans les temps modernes, nous n’avons vu que deux exemples d’un tel régime : d’une part, les États musulmans ; de l’autre, l’ancien État pontifical du temps du pouvoir temporel. Et il faut dire que la papauté temporelle n’a pesé que sur un bien petit pays, tandis que l’islamisme écrase de vastes portions de notre globe et y maintient l’idée la plus opposée au progrès : l’État fondé sur une prétendue révélation, le dogme gouvernant la société.
Les libéraux qui défendent l’islam ne le connaissent pas. L’islam, c’est l’union indiscernable du spirituel et du temporel, c’est le règne d’un dogme, c’est la chaîne la plus lourde que l’humanité ait jamais portée. Dans la première moitié du moyen âge, je le répète, l’islam a supporté la philosophie parce qu’il n’a pas pu l’empêcher ; il n’a pas pu l’empêcher, car il était sans cohésion, peu outillé pour la terreur. La police était entre les mains des chrétiens et occupée principalement à poursuivre les tentatives des Alides. Une foule de choses passaient à travers les mailles de ce filet assez lâche. Mais quand l’islam a disposé de masses ardemment croyantes, il a tout étouffé. La terreur religieuse et l’hypocrisie ont été à l’ordre du jour. L’islam a été libéral quand il a été faible, et violent quant il a été fort. Ne lui faisons donc pas honneur de ce qu’il n’a pas pu empêcheur. Faire honneur à l’islam de la philosophie et de la science qu’il n’a pas pu étouffer, c’est comme si l’on faisait honneur aux théologiens des découvertes de la science moderne. Ces découvertes se sont faites malgré les théologiens.

La théologie occidentale n’a pas été moins persécutrice que celle de l’islamisme. Seulement, elle n’a pas réussi, elle n’a pas écrasé l’esprit moderne, comme l’islamisme a écrasé l’esprit des pays qu’il a conquis. Dans notre Occident, la persécution théologique n’a réussi qu’en un seul pays c’est en Espagne. Là, un terrible système d’oppression, a étouffé l’esprit scientifique. Hâtons nous de le dire, ce noble pays prendra sa revanche. Dans les pays musulmans, il s’est passé ce qui serait arrivé en Europe si l’Inquisition, Philippe II et Pie V avaient réussi dans plan d’arrêter l’esprit humain. Franchement, j’ai beaucoup de peine à savoir gré aux gens du mal qu’ils n’ont pas pu faire.
Non ; les religions ont leurs grandes et belles heures, quand elles consolent et relèvent les parties faibles de notre pauvre humanité ; mais il ne faut pas leur faire compliment de ce qui est né malgré elles, de ce qu’elles ont cherché à empêcheur. On n’hérite pas des gens qu’on assassine ; on ne doit point faire bénéficier les persécuteurs des choses qu’ils ont persécutées.
C’est pourtant là ce que l’on fait quand on attribué l’influence de l’islam un mouvement qui s’est produit malgré l’islam, contre l’islam, et que l’islam, heureusement, n’a pas pu empêcher. Faire honneur à l’islam d’Avicenne, d’Avenzoar, d’Averroès, c’est comme si l’on faisait honneur au catholicisme de Galilée. La théologie a fort gêné Galilée ; elle n’a pas réussi à l’arrêter ; ce n’est pas une raison pour qu’il faille lui en avoir une grande reconnaissance. Loin de moi des paroles d’amertume contre aucun des symboles dans lesquels la conscience humaine a cherché le repos au milieu des insolubles problèmes que lui présentent l’univers et sa destinée. L’islamisme a de belles parties comme religion ; je ne suis jamais entré dans une mosquée sans une vive émotion, le dirai-je ? sans un certain regret de n’être pas musulman. Mais, pour la raison humaine, l’islamisme n’a été que nuisible. Les esprits qu’il a fermés à la lumière y étaient déjà sans doute fermés par leurs propres bornes intérieures ; mais il a persécuté la libre pensée, je ne dirai pas plus; violemment que d’autres systèmes religieux, mais plus efficacement. Il a fait des pays qu’il a conquis un champ fermé à la culture rationnelle de l’esprit.

Ce qui distingua en effet, essentiellement le musulman, c’est la haine de la science, c’est la persuasion que la recherche est inutile, frivole, presque impie ; la science est concurrence faite à Dieu ; la science historique parce que, s’appliquant à des temps antérieurs à l’islam, elle pourrait raviver d’anciennes erreurs.
Un des témoignages les plus curieux à cet égard est celui de cheik Rifaa, qui avait résidé plusieurs années à Paris comme aumônier de l’École égyptienne, et qui, après son retour en Égypte, fit un ouvrage plein des observations les plus curieuses sur la société française. Son idée fixe est que la science européenne, surtout par son principe de la permanence des lois de la nature, est d’un bout à l’autre une hérésie ; et, il faut le dire, au point de vue de l’islam, il n’a pas tout à fait tort. Un dogme révélé est toujours opposé à la recherche libre, qui peut le contredire. Le résultat de la science est non pas d’expulser, mais d’éloigner toujours le divin, de l’éloigner, dis-je, du monde des faits particuliers où l’on croyait le voir. L’expérience fait reculer le surnaturel et restreint son domaine. Or le surnaturel est la base de toute théologie. L’islam, en traitant la science comme son ennemie, n’est que conséquent ; mais il est dangereux d’être trop conséquent. L’islam a réussi pour son malheur. En tuant la science, il s’est tué lui-même, et s’est condamné dans le monde à une complète infériorité.

Quand on part de cette idée que la recherche est une chose attentatoire à la paresse d’esprit, au manque de précision, à l’incapacité d’être exact. Allah aalam, « Dieu sait mieux ce qui en est », est le dernier mot de toute discussion musulmane.

Dans les premiers temps de son séjours à Mossoul, M. Layard désira, en esprit clair qu’il était, avoir quelques données sur la population de la ville, sur son commerce, ses traditions historiques1. Il s’adressa au cadi, qui lui fit là réponse suivante, dont je dois la traduction à une personne amie :

« Ô mon illustre ami, ô joie des vivants !
Ce que tu me demandes est à la fois inutile et nuisible. Bien que tous mes jours se soient écoulés dans ce pays, je n’ai jamais songé à en compter les maisons, ni à m’informer du nombre de leurs habitants. Et, quant à ce que celui-ci met de marchandises sur ses mulets, celui-là au fond de sa barque, en vérité, c’est une chose qui ne me regarde nullement. Pour l’histoire antérieure de cette cité, Dieu seul la sait, et seul il pourrait dire de combien d’erreurs ses habitants se sont abreuvés avant la conquête de l’islamisme. Il serait dangereux à nous de vouloir les connaître.
Ô mon ami, ô ma brebis, ne cherche pas à connaître ce qui ne te concerne pas. Tu es venu parmi nous et nous t’avons donné le salut de bienvenue ; va-t-en en paix ! À la vérité, toutes les paroles que tu m’as dites ne m’ont fait aucun mal ; car celui qui parle est un, et celui qui écoute est un autre. Selon la coutume des hommes de ta nation, tu as parcouru beaucoup de contrées jusque ce que tu n’aies plus trouvé le bonheur nulle part. Nous (Dieu en soit béni !), nous sommes nés ici, et nous ne désirons point en partir.
Écoute, ô mon fils, il n’y a point de sagesse égale à celle de croire en Dieu. II a créé le monde ; devons nous tenter de l’égaler en cherchant à pénétrer les mystères de sa création ? Vois cette étoile qui tourne là-haut autour de cette étoile ; regarde cette autre étoile qui traîne une queue et qui met tant d’année à venir et tant d’années à s’éloigner ; laisse-la mon fils ; celui dont les mains la formèrent saura bien la conduire et la diriger.
Mais, tu me diras peut-être : « Ô homme ! retire-toi, car je suis plus savant que toi, et j’ai vu des choses que tu ignores ! » Si lu penses que ces choses t’ont rendu meilleure que je ne le suis, sois doublement le bienvenu : mais, moi, je bénis Dieu de ne pas chercher ce dont je n’ai pas besoin. Tu es instruit dans des choses qui ne m’intéressent pas, et ce que tu as vu, je le dédaigne. Une science plus vaste te créera-t-elle un second estomac, et tes yeux, qui vont furetant partout, te feront-ils trouver un paradis ?
Ô mon ami, si tu veux être heureux, écrie-toi : « Dieu seul est Dieu ! » Ne fais point de mal, et alors tu ne craindras ni les hommes ni la mort, car ton heure viendra. »

Ce cadi est très philosophe à sa manière ; mais voici là différence : nous trouvons charmante la lettre du cadi, et lui, il trouverait ce que nous disons ici abominable. C’est pour une société, d’ailleurs, que les suites d’un pareil esprit sont funestes. Des deux conséquences qu’entraîne le manque d’esprit scientifique, la superstition ou le dogmatisme, la seconde est peut-être pire que la première. L’Orient n’est pas superstitieux ; son grand mal, c’est le dogmatisme étroit, qui s’impose par la force de la société tout entière. Le but de l’humanité, ce n’est pas le repos dans une ignorance résignée ; c’est la guerre implacable contre le faux, la lutte contre le mal.
La science est l’âme d’une société ; car la science, c’est la raison. Elle crée la supériorité militaire et la supériorité industrielle. Elle créera un jour la supériorité sociale, je veux dire un état de société où la quantité de justice qui est compatible avec l’essence de l’univers sera procurée. La science met la force au service de la raison. Il y a en Asie des éléments de barbarie analogues à ceux qui ont formé les premières armées musulmanes et ces grands cyclones d’Attila, de Gengiskhan. Mais la science leur barre le chemin. Si Omar, si Gengiskhan avaient rencontré devant eux une bonne artillerie, ils n’eussent pas dépassé les limites de leur désert. Il ne faut pas s’arrêter à des aberrations momentanées.
Que n’a-t-on pas dit, à l’origine, contre les armes feu, lesquelles pourtant ont bien contribué à la victoire de la civilisation ? Pour moi, j’ai la conviction que la science est bonne, qu’elle seule fournit des armes contre le mal qu’on peut faire avec elle, qu’en définitive elle ne servira que le progrès, j’entends le vrai progrès, celui qui est inséparable du respect de l’homme et de la liberté.

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J'avais entendu dans une émission télé il y a environ 20/25 ans, une phrase qui m'avait marquée et que je vais tenter de reproduire

Dieu avec passion
Dieu avec folie
Nous sommes de la bonne église, synagogue, temple, mosquée.
Dieu est avec moi,
Avec nous
Pas avec toi,
Pas avec vous
Alors je te convertis ou te te tue
Au nom de Dieu
--------------------------------------------------------------
le mal triomphe par l'inaction des gens de bien (Edmund Burke)

On résiste à l’invasion des armées, on ne résiste pas à l’invasion des idées. (Victor Hugo)
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le nombre de batailles, Ghazaouates, que le Prophète, , a mener : ne sont pas des agressions mais sont des batailles contre les agressions menées par les juifs et les mecquois et les roumains ...
Oui, je sais bien qu' avec PBSL,
la guerre c'est la paix,
la haine c'est l'amour,
l'intolérance c'est la tolérance,
l'esclavage c'est la liberté

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Tombez dans un piège à con, devenez musulman ou islamiste ou terroriste ou pirate


J'aime beaucoup cet appel musulman à la prière :
gsgdgfgdfrvcxx a écrit : lun. 26 nov. 2018 01:53Acheter la monnaie contrefaite indétectable.
C'est exactement cela, cette secte islam.
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Le coran lave plus gris...


Avec Mahomet, moHamed, mUhAmMaD, Ahmed 2.0
Les juifs sont musulmans,
Dieu s'appelle allah,
Bouddha, Victor Hugo et Napoléon sont musulmans,
li fransé je li parle mieu que toa et je ti maudi,
la lapidation c'est romantique,
la haine c'est ainsi qu'on doit pardonner,
le devoir absolu du djihad, c'est la tolérance,
l'esclavage c'est la liberté retrouvée,
et le coran il est tombé du ciel comme le choléra, la peste et le sida


.

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Message non lu par marmhonie »

Ouah Allo A'larme a écrit :Le coran lave plus gris...


Avec Mahomet, moHamed, mUhAmMaD, Ahmed 2.0
Les juifs sont musulmans,
Dieu s'appelle allah,
Bouddha, Victor Hugo et Napoléon sont musulmans,
li fransé je li parle mieu que toa et je ti maudi,
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et le coran il est tombé du ciel comme le choléra, la peste et le sida


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Par la Barbe du Saint Prophète
Par la lune fendue
Par le soleil qui se couche dans une eau boueuse
Par l'âne Yaffour qui promène Anne Hidalgo
Par l'étoile qui scintille
Par les houris fillettes vierges bonnes à enfiler,
Par l'eau qui mouille
Par le feu qui brûle
Par la terre plate équilibrée
Par les montagnes jetées du ciel,
Tu es dans un égarement évident.
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«Orwell reprochait à la gauche petite bourgeoise son mépris implicite des classes populaires»

Par Alexandre Devecchio Mis à jour le 23/04/2018 à 15:44 Publié le 21/04/2018 à 14:33

«Orwell reprochait à la gauche petite bourgeoise son mépris implicite des classes populaires»

FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN - Kévin Boucaud-Victoire présente dans un essai passionnant les multiples facettes d'un écrivain qu'il juge inclassable, et dont les multiples récuparations politiques dissimulent parfois la fécondité de sa pensée, toujours actuelle.

Kévin Boucaud-Victoire est journaliste et essayiste. Il vient de publier Orwell, écrivain des gens ordinaires (Première Partie, 2018).

FIGAROVOX.- Vous consacrez un petit essai à George Orwell. Celui-ci est souvent résumé à ses deux classiques: La Ferme des animaux (1945) et 1984 (1949). Est-ce réducteur? Pour vous, Orwell est le plus grand écrivain politique du XXe siècle. Pourquoi?

Kévin BOUCAUD-VICTOIRE.- George Orwell reste prisonnier de ses deux derniers grands romans. Il faut dire qu'avant La Ferme des animaux, l'écrivain a connu échec sur échec depuis 1933 et la sortie de Dans la dèche à Paris et à Londres. Il y a plusieurs raisons à cela. Déjà, Orwell tâtonne pour trouver son style, et bien qu'intéressants, ses premiers écrits sont parfois un peu brouillons. Ensuite ses deux premiers grands essais politiques, Le quai de Wigan (1937) et Hommage à la Catalogne (1938) sont très subversifs. La seconde partie du premier est une critique impitoyable de son camp politique. Il reproche à la gauche petite bourgeoise son mépris implicite des classes populaires, son intellectualisme et son idolâtrie du progrès. Au point que son éditeur Victor Gollancz ne voulait au départ pas publier le livre d'Orwell avec cette partie, qu'il ne lui avait pas commandée. Hommage à la Catalogne dénonce le rôle des communistes espagnols durant la révolution de 1936. Il est alors victime d'une intense campagne pour le discréditer et doit changer d'éditeur pour le publier. À sa mort en 1950, les 1 500 ouvrages imprimés ne sont pas écoulés. Il a d'ailleurs aussi beaucoup de mal à faire publier La Ferme des animaux au départ. Ces deux ouvrages essentiels sont encore trop mal connus aujourd'hui. Je ne parle même pas de ses nombreux articles ou petits essais qui précisent sa pensée ou Un peu d'air frais, mon roman préféré d'Orwell, publié en 1939.

Sinon, l'Anglais a voulu faire de l'écriture politique une nouvelle forme d'art, à la fois esthétique, simple et compréhensible de tous. Aucun roman selon moi n'a eu au XXe siècle l'impact politique de 1984 et La Ferme des animaux. C'est ce qui explique qu'il a été ensuite, et très tôt après sa mort, récupéré par tout le monde, même ceux qu'il considérait comme ses adversaires politiques.

Vous jugez que l'utilisation qui est faite d'Orwell est une récupération politique?

Tout le monde est orwellien !

«Tout ce que j'ai écrit de sérieux depuis 1936, chaque mot, chaque ligne, a été écrit, directement ou indirectement, contre le totalitarisme et pour le socialisme démocratique tel que je le conçois», écrit en 1946 Orwell dans un court essai intitulé Pourquoi j'écris? Mais il a surtout été connu pour ses deux romans qui attaquent frontalement le totalitarisme. À partir de là, libéraux et conservateurs avaient un boulevard pour le récupérer. Ainsi, en pleine guerre froide, la CIA a produit une bande-dessinée et un dessin-animé de La Ferme des animaux, parfois en déformant légèrement son propos, diffusés un peu partout dans le monde. L'objectif était alors de stopper l'avancée du communisme dans le monde.

Depuis quelques années, «Orwell est invité à toutes les tables», comme l'explique le journaliste Robin Verner dans un excellent article pour Slate.fr. De l'essayiste Laurent Obertone à l'ENA, tout le monde est orwellien! Les récupérations ne sont pas que l'œuvre de la droite. Ainsi, depuis deux ou trois ans, Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération, s'est fait le héraut de la réhabilitation d'un Orwell de gauche. Pourtant, il a tout du prototype de la gauche petite bourgeoise sur laquelle a vomi l'écrivain dans Le Quai de Wigan, particulièrement dans les chapitres X à XIII.

Mais si Orwell est aussi récupérable c'est parce que la vérité était pour lui prioritaire, plus que l'esprit de camp politique. «L'argument selon lequel il ne faudrait pas dire certaines vérités, car cela “ferait le jeu de” telle ou telle force sinistre est malhonnête, en ce sens que les gens n'y ont recours que lorsque cela leur convient personnellement», écrit-il. «La liberté, c'est la liberté de dire que deux et deux font quatre. Lorsque cela est accordé, le reste suit», pouvons-nous lire aussi dans 1984. Après, je ne fais pas parler les morts, mais je doute qu'Orwell se serait insurgé contre le fait d'être cité par des adversaires politiques, lui qui avait des amis conservateurs ou libéraux.

Orwell n'est donc ni conservateur, ni socialiste?

On peut déjà relever qu'à partir de 1936, il s'est réclamé du socialisme démocratique plus d'une fois dans ses écrits. Malgré des penchants parfois conservateurs, il a aussi récusé appartenir à ce camp. Il écrit dans Le lion et la licorne, son deuxième plus grand essai politique, que son patriotisme «n'a rien à voir avec le conservatisme. Bien au contraire, il s'y oppose, puisqu'il est essentiellement une fidélité à une réalité sans cesse changeante et que l'on sent pourtant mystiquement identique à elle-même».

Orwell est un socialiste qui apprécie les traditions, se veut patriote, anti-progressiste et très démocrate !

Effectivement, Orwell est très complexe et un peu inclassable. «Trop égalitariste et révolutionnaire pour être social-démocrate ou travailliste, mais trop démocrate et antitotalitaire pour être communiste ; trop lucide sur la réalité des rapports de force entre les hommes et entre les États pour être anarchiste, mais trop confiant dans la droiture et dans le refus de l'injustice parmi les gens ordinaires pour basculer comme tant d'autres dans le pessimisme conservateur», écrit Jean-Jacques Rosat, un des grands connaisseurs actuels de l'écrivain. Mais pour lui, «le véritable socialiste est celui qui souhaite - activement, et non à titre de simple vœu pieux - le renversement de la tyrannie» (Le Quai de Wigan) et c'est comme cela qu'il se définit. Mais c'est un socialiste qui apprécie les traditions, se veut patriote, anti-progressiste et très démocrate!

Le philosophe Jean-Claude Michéa voit en lui un anarchiste conservateur. Partagez-vous cette définition?

En fait Orwell a utilisé cette formule, volontairement provocante, pour parler de lui jeune, quand il n'était pas encore politisé. Mais ensuite il ne s'est plus déclaré que socialiste. En fait, si Michéa a popularisé cette expression, il l'a reprise de Simon Leys, sinologue belge, deuxième biographe le plus important de l'Anglais, décédé en 2014. Leys explique dans Orwell ou l'horreur de la politique que si Orwell est socialiste, «anarchiste conservateur» est «certainement la meilleure définition de son tempérament politique». Ça peut sûrement sembler compliqué à première vue.

Dans Le Complexe d'Orphée, Michéa explique qu'il faut distinguer une pensée construite d'un tempérament politique, sorte d'inclination naturelle. Ainsi, il explique que le tempérament d'Orwell combine un «sentiment légitime qu'il existe, dans l'héritage plurimillénaire des sociétés humaines, un certain nombre d'acquis essentiels à préserver», avec «un sens aigu de l'autonomie individuelle (ou collective) et avec une méfiance a priori envers toutes les relations de pouvoir (à commencer, si possible, par celles que l'on serait tenté d'exercer soi-même).» Je pense qu'il est difficile de mieux décrire Orwell. J'ajouterais que l'un des intérêts de l'expression «anarchiste conservateur» se trouve dans son potentiel polémique: accoler l'adjectif «conservateur» à un intellectuel de gauche, rien de tel pour heurter les belles âmes.

Le professeur de philosophie Jean-Jacques Rosat conteste cette définition. Pourquoi?

Il y a en effet une petite querelle chez les orwelliens à ce sujet. En effet, d'un côté, il y a l'école Leys, Michéa, ou encore François Bordes qui qualifie Orwell de socialiste et d'anarchiste conservateur ou «anarchiste tory» en V.O. De l'autre il y a celle de Rosat et plus largement Agone, qui récuse le dernier terme. En 2006, dans sa préface à la traduction française de La politique selon Orwell de John Newsinger, Rosat accuse Leys et Michéa de fausser la compréhension d'Orwell. En 2011, il publie dans une revue d'Agone dédiée à l'écrivain anglais un article intitulé «Ni anarchiste ni tory: Orwell et “la révolte intellectuelle”».

Dans cet article très intéressant, il explique qu'à partir de 1936, Orwell n'utilise le terme que pour qualifier Jonathan Swift, écrivain qu'il admire, mais dont il s'oppose aux idées. Rosat rappelle qu'Orwell reproche à Swift d'être «un anarchiste tory, qui méprise l'autorité sans croire à la liberté, et qui défend une conception aristocratique tout en voyant bien que l'aristocratie de son époque est dégénérée et méprisable.» Le philosophe français rappelle que l'Anglais est bel et bien un socialiste. Pour lui, le définir comme anarchiste conservateur a deux conséquences néfastes. Cela le condamne «à être un penseur irrémédiablement incohérent, un penseur qui cache derrière une façade socialiste une attitude politique profondément différente.» Enfin, «si Orwell est fondamentalement un conservateur, tant comme homme que comme penseur, alors la gauche et l'extrême gauche ont eu raison d'avoir de forts soupçons à son égard dans le passé».

Il y a une compatibilité entre Orwell, farouche athée, et un christianisme radical c'est-à-dire qui va à la racine.

Alors que faut-il en penser? Déjà rappelons que Michéa écrit dans Le Complexe d'Orphée que Rosat a raison, si on reste sur le plan strictement politique. Il faut donc revenir à la distinction entre pensée construite et tempérament politique que j'évoquais plus haut. Pour trancher, je dirais que si Orwell est bel et bien un socialiste, le qualificatif d'anarchiste conservateur présente un intérêt essentiel pour comprendre ses positions qui peuvent surprendre dans son camp.

Vous n'hésitez pas à rapprocher Orwell de penseurs chrétiens comme Simone Weil, Bernanos ou Pasolini. Quels sont ses points communs avec ces derniers?

Pasolini n'était pas vraiment chrétien, puisque s'il appréciait l'Église catholique, il lui manquait la foi. Il y a aussi Chesterton, Orwell ayant été surnommé à ses débuts «le Chesterton de gauche». Mais effectivement, il y a une compatibilité entre Orwell, farouche athée, et un christianisme radical - c'est-à-dire qui va à la racine. Ces penseurs vont au bout de la logique des évangiles ou de l'épître de Jacques, en refusant la puissance de l'argent et la quête du pouvoir - la troisième tentation du Christ laisse entendre que le pouvoir terrestre appartient actuellement à Satan. D'ailleurs, cela me fait penser à Guy Debord, père du situationniste et athée militant, qui écrit dans une lettre: «Les catholiques extrémistes sont les seuls qui me paraissent sympathiques, Léon Bloy notamment.».

Pour être un peu plus précis, on retrouve chez eux ce tempérament anarchiste conservateur, que j'ai évoqué tout à l'heure. Il y a une remise en question radicale du capitalisme et du progrès. Ils sont aussi des précurseurs de l'écologie politique. Ce n'est pas pour rien qu'on retrouve Orwell, Weil et Pasolini dans Radicalité: 20 penseurs vraiment critiques (L'échappée, 2013), ainsi que dans Aux origines de la décroissance: 50 penseurs (L'échappée, Le Pas de côté et Ecosociété, 2017), en compagnie cette fois de Bernnaos et Chesterton. Enfin, ce sont des esprits libres, lucides sur les erreurs de leur camp. Orwell a critiqué le rôle des communistes durant la guerre d'Espagne, Weil certaines violences de ses camarades anarchistes et écrit une lettre à Bernanos, appartenant au camp d'en face, pour lui témoigner sa «très vive admiration». Bernanos a publié Les grands cimetières sous la Lune, un énorme pamphlet contre Franco, ses soutiens catholiques, et plus largement la droite. Pour finir, Pasolini n'a pas eu de mots assez durs pour les petits-bourgeois de gauche italiens, notamment en Mai 68. Autant de liberté intellectuelle et politique est assez rare aujourd'hui.

Vous voyez en lui un promoteur du «socialisme du vécu» et du «socialisme populaire». Quelles sont les spécificités de ces deux formes de socialisme?

Je rapproche le socialisme d'Orwell et celui de Simone Weil sur ce plan. En fait, je montre que ce ne sont pas les livres et la théorie qui ont converti Orwell au socialisme, mais ce qu'il a pu vivre, en Birmanie, dans les bas-fonds parisiens et londoniens qu'il a fréquentés, à Wigan, où il a côtoyé les ouvriers, et en Espagne. Il explique d'ailleurs qu'en Catalogne il a constaté que non seulement le socialisme était désirable, mais qu'il était en plus possible.

Orwell, comme Simone Weil, plaide pour que les socialistes partent du vécu des classes populaires.

Sinon, dans Le quai de Wigan, il affirme que «le mouvement socialiste a autre chose à faire que de se transformer en une association de matérialistes dialectiques ; ce qu'il doit être, c'est une ligue des opprimés contre les oppresseurs.» Pour lui, il doit accueillir «tous ceux qui courbent l'échine devant un patron ou frissonnent à l'idée du prochain loyer à payer». C'est en cela qu'il est vraiment populaire, alors qu'il constate que les socialistes appartiennent surtout à la classe moyenne éduquée. En fait, Orwell, comme Weil, plaide pour que les socialistes partent du vécu des classes populaires, qui ne se limitent pas qu'aux ouvriers, mais qui comprennent aussi les classes moyennes inférieures - des petits boutiquiers aux fonctionnaires -, en passant par les paysans.

Alors qu'en Europe la social-démocratie est en train de mourir pour cause de faillite idéologique, la pensée d'Orwell peut-elle inspirer une nouvelle gauche?

Je l'espère en tout cas. Sa critique du progrès par exemple me paraît essentielle. Il apparaît aujourd'hui évident que le progrès technique a «fait faillite», comme le disait Orwell, et n'a pas tenu ses promesses. Il a renforcé à la fois l'aliénation capitaliste et l'exploitation des classes populaires. «Si un homme ne peut prendre plaisir au retour du printemps, pourquoi devrait-il être heureux dans une Utopie qui circonscrit le travail? Que fera-t-il du temps de loisir que lui accordera la machine?», se demande Orwell dans «Quelques réflexions avec le crapaud ordinaire».

Son équilibre entre patriotisme et internationalisme me paraît aussi vital, quand la gauche s'est aujourd'hui parfois trop perdue dans un internationalisme abstrait, croyant que la nation renvoyait toujours aux heures les plus sombres. Ainsi, l'Anglais rappelle que «la théorie selon laquelle “les prolétaires n'ont pas de patrie” […] finit toujours par être absurde dans la pratique». La nation est le seul bien de ceux qui sont privés de tout et c'est aujourd'hui le seul cadre démocratique existant aujourd'hui. Enfin Orwell représente un socialisme qui reste radical, qui refuse à la fois de se compromettre dans l'autoritarisme, mais aussi avec le mode de production capitaliste, comme le PS depuis au moins 1983.

Comment expliquez-vous le succès de mouvement dits populistes auprès des «gens ordinaires»?

Le clivage gauche-droite ne fait plus recette.

C'est simple, le clivage gauche-droite ne fait plus recette. En France, comme à l'étranger, la gauche de gouvernement a oublié les classes populaires pour se concentrer sur les classes diplômées, plus progressistes et ouvertes, et les «minorités» - qui certes appartiennent souvent aux classes populaires, mais qui ne sont pas défendues comme telles mais comme des clients ou des consommateurs. La droite de son côté a souvent fait mine de défendre les classes populaires pour les trahir au pouvoir. Pourquoi les pauvres votent à droite et Pourquoi les riches votent à gauche, du journaliste Thomas Frank, donnent des clés très intéressantes pour comprendre.

À côté, la mondialisation néolibérale ne fonctionne plus. Les élites intellectuelles, politiques et économiques sont totalement déconnectées du peuple. Christopher Lasch, grand lecteur de George Orwell, le percevait déjà dans son livre-testament, La révolte des élites et la trahison des élites. Il expliquait que «les personnes qui se situent dans les 20 % supérieurs en termes de revenus», qui «contrôlent les flux internationaux d'argent et d'informations», «se définissent moins par leur idéologie que par leur mode de vie, qui les distingue, d'une manière de moins en moins équivoque, du reste de la population». Selon lui, ils n'acceptent plus «aucune des obligations que la citoyenneté dans une forme de cité sous-entend normalement», se sont «retirés de la vie commune et ne veulent plus payer pour ce qu'ils ont cessé d'utiliser».

Cette déconnexion est de plus en plus visible. En 2005, alors que presque tous les médias et les grands partis de gouvernement militent pour le «oui» au TCE, le «non» l'emporte. On a pu voir une vraie fracture sur les revenus et l'éducation dans le résultat du vote. La séquence qui suit est très intéressante, puisque le gouvernement de Nicolas Sarkozy et le parlement se sont ensuite assis sur cette décision démocratique en 2007. Les «mouvements populistes» capitalisent sur cette fracture et ce rejet des élites.

Ces derniers ne font-ils pas tout simplement preuve de davantage de «common decency» que les partis traditionnels?

Je n'en suis pas certain. Mais ils s'en servent en tout cas mieux. La droite dite «populiste» vante les valeurs populaires, souvent pour mieux les trahir. «Votez pour interdire l'avortement et vous aurez une bonne réduction de l'impôt sur le capital (…). Votez pour faire la nique à ces universitaires politiquement corrects et vous aurez la déréglementation de l'électricité (…). Votez pour résister au terrorisme et vous aurez la privatisation de la sécurité» écrit Thomas Frank dans Pourquoi les pauvres votent à droite? La victoire de Trump illustre parfaitement cette trahison constante. Le danger avec le populisme est qu'il utilise surtout le ressentiment - contre les immigrés ou les élites - que la «common decency», justement.

La droite dite « populiste » vante les valeurs populaires, souvent pour mieux les trahir.

Pourtant, je plaide bien pour un populisme, qui substituerait le clivage gauche/droite à un clivage peuple/élites ou classes populaires/oligarchie. Mais pour qu'il ait une chance de ne pas être juste un mouvement qui flatte les bas instincts populaires, il doit s'appuyer sur l'amour des classes populaires et l'empathie vis-à-vis de ce qu'elles vivent.

Orwell n'était-il pas avant tout un littéraire dont la particularité était justement de refuser toute forme d'idéologie et de pensée en système?

Tout à fait. Il se voulait d'abord écrivain. «Il me serait impossible d'écrire un livre, voire un article de revue de quelque importance, si cela ne représentait pas aussi pour moi une expérience esthétique», explique-t-il dans Pourquoi j'écris? Il se réfère bien plus à Swift, Dickens, London ou Wells qu'à Marx - qu'il n'a probablement jamais lu de première main - Engels ou Rosa Luxemburg. Cependant, il possédait une vraie pensée politique, non systémique, mais construite
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